« Passer des connaissances à l’action » : retour sur l’Open Knowledge Festival 2014

L’Open Knowledge Festival se tenait pour sa deuxième édition, du 15 au 18 juillet, à Berlin. Il a réuni les membres de l’Open Knowledge Foundation qui fêtait ses 10 ans en 2014. D’origine anglaise, cette organisation qui mène des projets autour de l’ouverture et du partage des connaissances a connu une rapide extension internationale notamment durant ces cinq dernières années. Elle compte aujourd’hui plus de 45 groupes à l’international.

 « Passer des connaissances à l’action  » : le leitmotiv du Festival

Ces trois journées de Festival ont été l’occasion de rassembler, outre la communauté de l’ Open Knowledge Foundation, un ensemble d’acteurs – « policy makers », entrepreneurs, chercheurs, « hackers », …-  pour réfléchir à la façon dont l’information peut aujourd’hui être ouverte, structurée et gouvernée.

Les workshops mis en place traduisaient bien la volonté du Festival, celle d’inciter à « Passer des connaissances à l’action » (une phrase répétée à de nombreuses reprises par Rufus Pollock, cofondateur de la fondation).

Les thématiques proposées en amont de l’événement par les participants étaient plurielles et variées. Un premier axe s’organisait autour des outils à mettre en place pour structurer, diffuser et visualiser l’ensemble des connaissances. D’autres thématiques étaient plus orientées sur les moyens d’actions susceptibles de faciliter le partage et l’ouverture des connaissances (gouvernance, cadre légal et économique). Enfin, d’autres sessions portaient plus sur l’enseignement à l’utilisation de ces savoirs libres.

Dans le domaine de la recherche plusieurs ateliers ont été organisés. Une session par exemple présentait un ensemble d’outils numériques pour la recherche (Web Native Science). Chacun pouvait y faire part de ses propres expériences ou compléter la liste des outils cités. Une autre session était dédiée aux problématiques juridiques en lien avec la fouille de données et des textes (text and data mining) dans les articles scientifiques. Enfin, un dernier atelier « How to teach Open Data ?» visait quant à lui à discuter du projet éducatif « L’école des données/School of Data »

Les workshops s’attachaient à donner la parole à l’ensemble des participants grâce à des formats contributifs (brainstorming, session post-its). De même, la partie « unfestival » permettait également à chacun de proposer ses propres sessions.

OKFest14-Twitter by @DataUY

OKFest14-Twitter by @DataUY

Ce festival, construit de façon contributive, a donné un aperçu général des projets en cours en matière d’Open Knowledge et a permis d’identifier de nouveaux projets à initier plutôt qu’un approfondissement des thématiques. Les temps d’échange et le networking étaient aussi facilités, dans un esprit convivial et parfois presque « corporate ». Mais comment faire sortir ces discussions de ce collectif déjà familiarisé ? C’est en parti ce à quoi semble s’attaquer aujourd’hui l’Open Knowledge Foundation, en témoigne, notamment, les invités des conférences.

 Open knowledge : une vision soutenue par l’Europe  

Neelie Kroes, vice-présidente à la Commission Européenne, impliquée depuis de nombreuses années dans les questions d’Open Knowledge a ainsi été invitée à s’exprimer. Elle était présente à cette seconde édition pour rappeler les challenges de l’Open Knowledge dans les domaines de la recherche (Open Science), de l’éducation (Open Education) et plus largement en matière de gouvernance autour des données (Open Data) et d’Internet (Open Internet). Elle a également rappelé l’implication de la Commission Européene dans des projets de ressources éducatives ouvertes ou le mandat en cours autour de l’Open Access (accès aux articles scientifiques financés par l’Europe). Selon Neelie Kroes, le partage des idées innovantes et la transparence sont essentiels pour une plus grande efficacité et de meilleurs résultats. Ces notions remettent en question les modes d’actions actuels et appellent un changement de mentalité majeur qu’elle souhaiterait voir embrasser par l’ensemble de la Commission Européenne.

Neilie Kroes-OKfest14-CC BY SA Celyagd

Neelie Kroes-OKfest14-CC BY SA Celyagd

Créer un écosystème autour de l’Open Knowledge 

Outre un changement de mentalité, c’est un changement de vision qui est nécessaire pour faire aboutir les initiatives en lien avec l’ouverture des connaissances. Eric Hysen, de Google, dans sa présentation rappelait ainsi qu’il est important de travailler sur les infrastructures : il faut penser en terme d’écosystème et rendre interopéable différents projets. Eric prenait l’exemple des hackatons. Aujourd’hui, ces évènements sont organisés partout dans le monde pour regrouper pendant quelques jours différents profils et créer des applications répondant à telle ou telle problématique. Or, une multitude d’applications donnent le jour à des fonctionnalités répétitives ou qui ne partagent pas les mêmes standards. Cette multiplication et cet éparpillement les rendent moins efficaces et ne sont pas favorables au développement d’un écosystème durable. Cette constatation a également été illustrée par Martin Fenner (PLOS) dans le domaine de l’Open Science. Il observe qu’aujourd’hui de nombreux projets Open Science veulent s’attaquer à de trop nombreuses problématiques, en un même temps, engendrant un travail en parallèle plutôt qu’en collaboration. Ce manque de coopération est flagrant et délétère selon Martin Fenner, lorsque l’on sait que ces initiatives nécessitent un nombre très important d’utilisateurs pour réussir à se développer.

 De l’activisme mais avec tact et négociation

Ory Okolloh, juriste et activiste Keyniane, a fourni, au micro de Rufus Pollock un témoignage intéressant. Ex-Policy manager de Google Africa, elle a su rappeler qu’il fallait sortir d’une vision naïve de l’activisme autour de l’Open Knowledge. Elle a illustré avec ses différentes expériences, l’importance de la négociation et du tact et la nécessité d’une connaissance du fonctionnement des grands groupes.

Elle rappelle ainsi que l’Open Knowledge Foundation ne se doit pas  seulement de refléter un mouvement idéologique mais qu’elle doit aussi apprendre des connaissances qu’elle produit pour apporter de façon réaliste et durable les actions et transformations qu’elle souhaite voir dans la société.

 

Merci à Sophie Puig pour sa précieuse relecture. Ce post a été publié préalablement sur le site du Centre Virchow-Villermé

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